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Le Collectif Marianne : l’étudiant nationaliste d’Assas a bien changé

Le Collectif Marianne : l’étudiant nationaliste d’Assas a bien changé

Nolwenn Le Blevennec | Journaliste Rue89


Yacine Zerkoun, Marine Le Pen et David Masson-Weyl, au lancement du Collectif Marianne (Nolwenn Le Blevennec/Rue89)

Au troisième rang, dans la petite salle du XVe arrondissement de Paris, un couple s’est fait remarquer par la sécurité. Elle, a des cheveux violets et porte du vernis noir, lui a un crâne rasé et il a mis un pull Boulogne boys, sur lequel est dessiné un bouledogue hostile et la France bleu, blanc, rouge.

Au bout de vingt minutes, un agent vient demander à l’homme d’enlever son sweat. « C’est une consigne que j’ai », nous explique-t-il à la fin de la réunion.

« Ces gens-là ne sont pas représentatifs du parti. »

Le couple n’était pas représentatif de l’audience, en effet. Il était même très isolé parmi les étudiants bourgeois à mèche et à serre-tête.

Ce samedi après-midi, le FN lançait le Collectif Marianne, un think tank regroupant des étudiants « patriotes » et haut de gamme : grandes écoles, universités et classes préparatoires. Un groupe qui s’inspire du Collectif Racine, rassemblant des enseignants proches des idées frontistes.

« Je me reconnais dans Florian Philippot »

David Masson-Weyl, ancien étudiant en droit, est en double master : relations internationales à Assas et histoire militaire à la Sorbonne. Il est le responsable du collectif.

C’est un jeune homme blond de 21 ans, à la démarche aussi droite et légère que celle d’un suricate. Il a une tête rassurante et un sourire poli. Fils d’un cadre SNCF et d’un agent de voyage, il vient de Charenton-Le-Pont (Val-de-Marne). Il s’intéresse à l’Asie et à la musique baroque.

Il est un pur produit Florian Philippot, le vice-président du Front national en charge de la communication : souverainiste éduqué. Il dit de lui :

« Je l’admire parce qu’il est parti de pas grand-chose et qu’il est arrivé là. Avec ses interventions médiatiques, il a fait du FN un grand mouvement souverainiste. »

Selon lui, le collectif compte, pour le moment, une vingtaine de membres. L’idée n’est pas de devenir un syndicat étudiant, mais d’apporter des idées. Il appelle tous les étudiants à se joindre à eux « du MRC à DLR [du Mouvement républicain et citoyen à Débout la république, ndlr] ». Lui n’est pas encarté « pour garder une certaine liberté ».

A ses côtés, pour parfaire l’image consensuelle, on trouve Yacine Zerkoun, « musulman et patriote » mais aussi « écrivain et poète ». Connu pour une tribune publiée sur Boulevard Voltaire, applaudie par toute l’extrême droite.

« Plus vous vous considérez algériens, marocains ou tunisiens, plus vous vous éloignez de l’évidence : vous êtes français. »

Ah, les bastons d’antan...

A la conférence, ce samedi, il y avait peu d’étudiants et très peu de journalistes – cela a même étonné Marine Le Pen. Les cadres du FN ou du Front national de la jeunesse (FNJ) étaient également absents (« Ils sont en campagne », nous répond-on). Seulement quelques souverainistes ont fait le déplacement, comme Paul-Marie Coûteaux ou Bertrand Dutheil de La Rochère.

Les discours de présention du collectif, long comme un exposé dont les parties n’auraient pas été harmonisées, ont porté sur la « massification » de l’université, le défaut d’engagement politique des étudiants, le chômage, l’exil, l’euro fort.

Quand Jean-Marie Le Pen était étudiant en droit à Assas, il était sur un autre registre. A la tête de la « Corpo », il était connu pour être fort en gueule et bagarreur. Plus tard, dans les couloirs d’Assas, Patrick Devedjian et Alain Madelin se bastonnaient aussi au sein du groupe Occident. Mais aujourd’hui, des profils violents comme les leurs seraient éjectés du parti.

Ce collectif a une utilité bien précise : permettre aux étudiants du FN d’avoir une structure propre. Et de ne plus être captés par le Groupe union défense (GUD), ce syndicat étudiant d’extrême droite né en 1968 sur les bancs de l’université Panthéon-Assas.

Pour la présidente du FN, c’est un moyen de se démarquer de cette organisation et dans le futur, de clouer le bec aux journalistes qui lui posent des questions.

Liens d’amitié entre jeunes du FN et Gudards

En interview, Marine Le Pen déteste qu’on lui parle de son amitié avec Frédéric Châtillon, ancien leader du GUD. Quand on lui demande si elle est influencée par lui, soit elle se met en colère et refuse de répondre, soit elle se moque de la question (« Parlons des sujets qui préoccupent vraiment les Français »).

Frédéric Châtillon, grand supporter de Bachar el-Assad, est un prestataire du FN, via sa société Riwal. Il est aussi l’ex-mari de l’une de ses meilleures amies, Marie d’Herbais.

Plus embarrassant, il existe des liens d’amitié entre les jeunes du FN et les Gudards et elle a dû s’en justifier. En décembre 2012, lors de la soirée à huis clos du 40e anniversaire du FN, célébré à La Mutualité, Marion Maréchal est prise en photo entourée du président du FNJ, Julien Rochedy, mais aussi de deux responsables de l’époque du néo-GUD, Edouard Klein et Baptiste Coquelle.

Dans un communiqué, la députée Rassemblement bleu marine s’était défendue :

« Je n’ai pas les moyens de m’assurer que ceux qui posent avec moi ne sont ni des fraudeurs fiscaux, ni des repris de justice, ni des criminels ou des extrémistes. »

« On importe des populations de l’étranger »

Le GUD est encore actif à Assas et à Lyon-III et il multiplie les actions violentes. Agression de militants de l’Unef (en février dernier), propos homophobes condamnés par la justice (en août), bagarre violente suite à des propos racistes (en juin)... David Masson-Weyl assure pourtant :

« Ce sont trois débiles qui ne représentent rien à Assas. Leur liste comptait dix personnes et ils n’ont réuni qu’une cinquantaine de voix chacun. »

Lui pose en pacifique. Son compte Twitter a visiblement été nettoyé. Mais en 2011, sur Facebook, il commentait ainsi une alerte du Figaro annonçant un record de fécondité en France :

« On importe des populations de l’étranger. CQFD. »


Capture d’écran d’un commentaire Facebook du compte David Masson-Weyl (Facebook)

Quel est le rapport entre la fécondité des femmes et l’immigration ? Ce samedi, il a pris air surpris qu’on lui pose la question.

« Je ne suis plus d’accord avec ces propos. »

http://rue89.nouvelobs.com/2014/03/08/collectif-marianne-letudiant-nationaliste-dassas-a-bien-change-250523



10/03/2014

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